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« Le Sénégal réussira-t-il à échapper à la pré-malédiction des ressources ? »

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Vue de la plateforme de forage Cajun Express de Cairn au large du Sénégal

[Tribune] Le gouvernement du président Macky Sall s’est engagé à être transparent dans son exploitation des ressources pétro-gazières. Mais d’autres challenges demeurent, pour William Davis et Hervé Lado du Natural Resource Governance Institute.Le 18 mai 2021, le gouvernement sénégalais a officiellement mis son cadastre pétrolier en ligne. Placé sous le patronage du président Macky Sall, cet événement, marque une étape importante dans le renforcement de la gouvernance des ressources pétrolières et gazières du pays, dans un contexte où la demande sociale de transparence et de redevabilité est forte.D’ici à la mise en production que le gouvernement espère pour 2023, le pays a l’opportunité de tirer encore plus de leçons de l’expérience des autres nouveaux producteurs.Recommandée par l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (Itie) et ses partenaires, la divulgation des cadastres pétroliers et miniers permet aux citoyens de disposer en temps réel d’informations sur l’allocation des parcelles et la vie des titres attribués, pour pouvoir participer mieux informés aux débats.Et des débats, il y en a au Sénégal comme il y en a eu dans des pays comme le Ghana, le Tchad ou le Mozambique, qui l’ont précédé dans la production. Gagnés par l’euphorie de leurs premières découvertes majeures, plusieurs pays africains avaient annoncé que le pétrole allait les sortir de la pauvreté.PLUSIEURS PAYS ONT EXAGÉRÉMENT EMPRUNTÉ EN S’APPUYANT SUR DES ATTENTES ET DES PRÉVISIONS DÉMESURÉESSur douze pays étudiés, aucun n’a pu accomplir ses rêves. Pour certains, les ressources n’étaient finalement pas commercialement viables, pour d’autres, les recettes réelles étaient décevantes et, pour tous, le calendrier des projets a invariablement déraillé, causant en moyenne un quasi-doublement des délais. Le Sénégal demeure dans les temps pour pouvoir conjurer cette «?pré-malédiction des ressources?» qui a été douloureuse pour ses prédécesseurs.La menace de l’excès d’optimismeCertes, il n’y a pas de risque que les ressources sénégalaises s’avèrent commercialement non viables, car les projets de GTA et de Sangomar ont déjà reçu des décisions finales d’investissement (DFI). Mais l’un des principaux risques qui menace les nouveaux producteurs est l’excès d’optimisme.Au début de leur aventure, plusieurs pays ont exagérément emprunté en s’appuyant sur des attentes et prévisions démesurées. Ils ont ensuite dû laborieusement restructurer leur dette (Tchad), se résoudre à une faillite (Mozambique) ou solliciter en urgence l’aide du Fonds monétaire international (Ghana).Le Sénégal apparaît plus prudent avec des emprunts qui, avant la pandémie, ont plutôt suivi la même tendance qu’avant les découvertes de pétrole et de gaz. Cela étant, le gouvernement s’est de plus en plus tourné vers la dette non concessionnelle (principalement les euro-obligations), qui s’accompagne généralement de taux d’intérêt plus élevés, d’échéances plus courtes et, par conséquent, augmente la vulnérabilité financière du pays.Un autre risque porte sur l’utilisation du gaz produit pour accroître les capacités énergétiques du pays.IL Y A UN RISQUE À TROP PARIER SUR LE PROJET YAKAAR-TERANGAC’est ce qu’a fait le Ghana en s’engageant dans un contrat « take-or-pay », qui est courant dans le secteur et contraint le pays à garantir le paiement de certaines quantités même s’il ne parvient pas à les absorber. Les infrastructures permettant d’utiliser le gaz n’étaient pas prêtes au début de la production, mais le Ghana a été malgré tout tenu de régler ses factures de gaz et consume ainsi jusqu’à présent une part significative de son budget chaque année, de l’ordre de 7% en 2020.Au Sénégal, ces plans de conversion semblent désormais tourner autour du projet Yakaar-Teranga qui, s’il représente une réelle opportunité, n’a pas encore reçu de DFI. Il y a donc un risque à trop parier sur ce projet, mais c’est aussi une opportunité pour le gouvernement de travailler à échapper au piège ghanéen.Se considérer comme un producteur modesteAlors que certains pays, plus riches en ressources, ont dû lisser l’utilisation de leurs importants revenus sur plusieurs années pour contrer l’inévitable volatilité, le Sénégal devrait se considérer comme un producteur modeste au vu des projections de revenus qui, sur la base des projets ayant déjà une DFI, se situent à moins de 3% de son produit intérieur brut (PIB).Comme l’ont expérimenté la Mauritanie ou São Tomé et Príncipe, de tels niveaux n’autorisent pas des investissements significatifs dans un mécanisme d’épargne. Toutefois, même modeste, cette épargne doit être bien investie et bien gérée. Dans cette perspective, le gouvernement envisage que le fonds d’investissement créé en 2012 (Fonsis) héberge un fonds générationnel qui investira une partie des revenus pétroliers et gaziers.À ce jour, certains indicateurs majeurs de bonne gouvernance manquent à l’appel : aucune évaluation indépendante des performances du Fonsis, ni aucun rapport d’audit n’ont été rendus publics. De plus, le Fonsis, qui accueille des revenus de divers secteurs, va investir dans des actifs nationaux. Une telle approche sera particulièrement risquée lorsque les revenus pétroliers et gaziers seront mobilisés. En effet, les gestionnaires du fonds générationnel pourraient, comme d’autres pays l’ont vécu, subir des pressions politiques pour favoriser des investissements moins pertinents pour le pays. Voire pour contourner les processus budgétaires nationaux ordinaires qui pourtant garantiraient un examen minutieux et contradictoire.LE SÉNÉGAL SEMBLE EN BONNE VOIE MAIS A ENCORE DE NOMBREUX DÉFIS À RELEVERUne stratégie d’investissement mise en œuvre par des professionnels du métier et indépendamment du Fonsis pourrait être plus adaptée pour le fonds générationnel.Aussi, la refonte en cours de la gouvernance de cette structure est une opportunité pour le rendre plus transparent et pour mieux aligner la gouvernance du fonds générationnel sur sa mission et sa spécificité.Le Sénégal semble en bonne voie pour éviter la « pré-malédiction des ressources », au vu des dispositifs de gouvernance, comme le cadastre pétrolier en ligne, que les autorités mettent en place. Il a néanmoins encore d’importants défis à relever, notamment sur les contrats de conversion du gaz en électricité à venir, ainsi que l’organisation d’une gestion des revenus qui lui épargnerait la « malédiction des ressources » une fois la production lancée.*William Davis est économiste principal et Hervé Lado, manager chargé de la Guinée, au Natural Resource Governance Institute (NRGI), think-tank spécialisé dans la gouvernance des industries extractives.
Auteur: jeuneafrique.com
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Comments

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    il y a 3 ans

    Cet article dépasse de très loin la capacité intellectuelle du lecteur moyen de Seneweb. Ces crétins et lascars ont déjà mordu au hameçon des voyous politiciens spécialistes de la désinformation et l'intoxication qui leur ont fait croire que Macky a donné le pétrole du Sénégal à son frère et à la France .Ces crétins ignorent que seules des compagnies americaines, britanniques et australiennes sont entrain de développer les champs petroliers et gaziers du Sénégal. Il faut dire qu'au Sénégal, même des intellectuels ne font pas la différence entre explorer et exploiter .

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    il y a 3 ans

    OUI,SI CE REGIME DÉGAGE. 

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    il y a 3 ans

    OUI,SI CE REGIME DÉGAGE. 

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    il y a 3 ans

    donner le pétrole et le gaz a des individus comme Samuel Sarr, nous connaitrons pire qu'une malédiction

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    il y a 3 ans

    Effectivement, on ne comprends pas grand chose à ce qui se fait et on préfère être dans l'affabulation...c'est un article que je pense assez objectif, comme on en souhaite  tout le temps. Le Sénégal pour aujourd'hui le Sénégal pour toujours. Ps: affilié à aucun parti politique; patriote (je pense) au vrai sens du terme. Ngen balma 

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    Agriculture et industries auss il y a 3 ans

    Kouf ! En Arabie bénie, le pétrole a su hisser bcp de pays désertiques, au nirvana du développement économique. Déjà un pays a lancé son vaisseau sur Mars, il ya moins d'un an,  Dubaï émerveille le monde occidental. C'est par milliers ( américains, français...) qu'ils y migrent, comme nous les pauvres negros qui prennent..la mer et qui meurent par centaines pour aller dans leurs pays devenus des Eldorados fantômes. Le pétrole fait bien émerger des pays dirigés par des gouvernants non corrompus jusqu'à la moelle épinière. Sachant aussi que le pétrole seul nous suffit pas. Il faut d'autres ingéniosités pour être un Japon plus pétrole. 

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    reply_author il y a 3 ans

    L'Arabie Saoudite est un pays très corrompue, c'est le Prince MBS qui commence à s'attaquer à ce fléau.

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    reply_author il y a 3 ans

    et c'est également lui en priorité qui en profite !

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    Passant il y a 3 ans

    Article très instructif. On assiste ses dernières semaines à la publication d'article de haute qualité, notamment de la diaspora. Pendant ce temps les responsables du pétrole mamadou fall kane et manar sall se donnent en spectacle comme des voyous. On dirait que les germes de la malédiction du pétrole sont déjà là. Il est temps de corriger la trajectoire avec une vision claire et de vrais professionnels.

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    Aladji il y a 3 ans

    "Crétins? ..le lecteur lamda..." Que d'arrogance et gros mot, à y déduire aisément que vous avez tort et vous en êtes conscients que vous avez joué au plus pressé, pourquoi n'avoir pas prendre le temps d'évaluer d'en discuter à l'assemblée ?! pourquoi élu en Fev-Mar et avant même de prendre ses repères le président valide l'attribution un champ petrolier à Timis + A. Sall! Cela n'exige pas, pour compendre, d'être savant, tout comme qu'un titre de commerce est un bien négociable, c'est un bien valorisable sans aucun doute! Excusez du peu il faut voir les dealers les fraudeurs les égoïstes chez vous 🙏

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