Le remaniement ministériel opéré samedi dernier confirme le caractère éminemment politique de certains ministères. On les appelle pourtant de "départements de souveraineté", mais dans la pratique, ils sont plus politiques. Il s'agit du ministère de l'Économie et des Finances, des départements de l'Intérieur, des Forces armées, de la Justice et des Affaires étrangères. L'éviction d'Ousmane Diagne de la Justice et de Jean-Baptiste Tine de l'Intérieur en est un exemple patent.

De Wade à Faye, chaque nouveau régime a mis en place un premier gouvernement dit de technocrates. Certains de ces ministères ont été confiés à des personnalités apolitiques. Mais rapidement, le président de la République s'est rendu compte du caractère politique de ces départements. C'est ce qui s'est passé avec le régime de Diomaye-Sonko. Le régime de Pastef a voulu donner des gages de transparence en choisissant des personnalités neutres aux ministères de l'Intérieur et de la Justice. Mais Sonko s'est rendu compte que le tempo qu'il veut n'est pas compatible avec la démarche d'Ousmane Diagne et Jean-Baptiste Tine. Il fallait donc les écarter pour mettre des politiques à la place.

Ce scénario n'a fait que se répéter avec des préoccupations différentes. Si Pastef a un problème de justice, l'Apr lui avait un problème politique. En 2012, dans un souci de transformation structurelle de l'économie du Sénégal, Macky avait opté pour un gouvernement dirigé par un banquier, Abdoul Mbaye en l'occurrence avec un autre banquier, Amadou Kane, au ministère de l'Économie et des Finances. Mais il a fallu moins de deux ans pour que Macky, évaluant les risques politiques, change de cap.

Désormais, il faut chercher un bilan en perspective de la prochaine présidentielle. C'est ainsi que Macky Sall s'est débarrassé du Premier ministre technocrate Abdoul Mbaye au profit de Mimi Touré, responsable politique. Amadou Kane le banquier sera remplacé par Amadou Ba, autre acteur en devenir. Ces changements entre hier et aujourd'hui sont la preuve parfaite du caractère politique des ministres dit de souveraineté.

En fait, les principaux leviers de l'État se situent dans ces départements. De la maîtrise de ces secteurs dépend l'orientation des actions politiques. Ainsi, lorsque Macky Sall a voulu avoir une équipe de répression entre 2021 et 2024, il a opté pour le tandem Antoine Diome-Ismaela Madior Fall, respectivement à l'Intérieur et à la Justice.