La lutte sénégalaise avec frappe (comme à la boxe, sans les gants), qui vient de boucler sa saison 2011 – 2012, traverse une mauvaise passe en raison de la violence qui la gangrène et de l’incertitude entourant le financement des combats.
Devenu le sport n°1 au Sénégal, la lutte avec frappe suscite un engouement populaire et draine un monde fou. La violence, qui la gangrène, a pris des proportions inquiétantes. La moindre manifestation aussi bien dans les stades qu’en dehors est marquée par des actes de violence.
Les derniers actes de violence ont été enregistrés, vendredi soir dans les locaux de la RTS (Télévision publique), après le face-à-face entre Boy Niang 2 et Zoss. Ce dernier a été blessé d'un coup de gourdin de son adversaire, avant d'être évacué aux urgences, pour des soins.
Si une médiation d’acteurs du milieu de la lutte a sauvé Boy Niang d’une plainte au pénal, le Comité national de gestion (CNG) de lutte, lui, n’a pas été tendre avec le fautif. Il a retiré, à titre conservatoire, au jeune lutteur sa licence ainsi que celle de son manager.
Déterminé à trouver une solution pour éradiquer le phénomène de la violence, le président du CNG, Dr Alioune Sarr, n’écarte pas de décréter une année sabbatique pour la saison.
''Si cela est nécessaire et cela devrait passer par une saison sabbatique de la lutte avec frappe, pourquoi pas (une année blanche) ? Je le dis avec beaucoup de conviction’’, a-t-il martelé dimanche dernier sur le plateau de l’émission ‘’Opinion’’ sur Walf TV (privée), dont il était l’invité.
Cette prise de position intervient dans un contexte de menace par les promoteurs de plafonnement des cachets des lutteurs. Réunis dans une structure informelle, ces organisateurs de combats ont décidé de ne plus payer à l’avenir plus de 100 millions de francs CFA à un lutteur.
La flambée des cachets avait permis à certains ténors de l’arène d’empocher jusqu’à 150 millions de francs CFA et plus de revenu individuel pour un combat. Une mesure à laquelle s’opposent les lutteurs.
La raréfaction en vue des ressources financières a contraint les promoteurs à serrer la ceinture. Les principaux pourvoyeurs de fonds de l’arène, les deux sociétés de téléphonie, la Sonatel et Tigo, ne semblent plus avoir le cœur à l’ouvrage.
La dernière susnommée s’est fait très discrète cette saison, alors qu’il est prêté à la première, via sa marque commerciale Orange, de vouloir se retirer de lutte sénégalaise. Ce double retrait serait fatal à la lutte avec frappe au Sénégal, selon les observateurs.
Alliant sport et culture, avec des chants de bravoure, des pratiques mystiques véhiculant la richesse culturelle du pays, la lutte avec frappe est une spécificité typiquement sénégalaise.
D’activité ludique intéressant une composante rurale ou périurbaine d’un certain âge, elle est devenue un phénomène intéressant toutes les couches de la population, au point de détrôner le football et d’être le sport n°1 au Sénégal.
L’engouement sans commune mesure qu’elle suscite fait courir les annonceurs et les chaînes de télévision qui se livrent une guerre sans merci pour décrocher des droits de diffusion. Les lutteurs, au cœur de ce business, sont payés à coup de dizaines de millions de francs CFA. Sera-ce encore le cas la saison prochaine ?
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