Maternité : quand les crèches chères brisent les rêves des femmes travailleuses
Au Sénégal, concilier maternité et carrière professionnelle reste un défi de taille pour les femmes. Le manque de crèches publiques accessibles, les tarifs prohibitifs des structures privées et leur qualité souvent jugée médiocre poussent de nombreuses mères à sacrifier leurs ambitions. Entre inquiétudes pour la sécurité de leurs enfants et coûts exorbitants, certaines choisissent de quitter leur emploi ou d’abandonner leurs études. Dans ce dossier, Seneweb donne la parole à des femmes confrontées à ce dilemme, révélant une réalité qui freine l’autonomisation féminine.
À Dakar, les femmes actives font face à une équation complexe lorsqu’il s’agit de confier leurs enfants à des crèches. Censées soutenir les mères travailleuses, ces structures sont souvent jugées trop chères, peu accessibles ou peu fiables. Certaines femmes, faute de moyens, renoncent à leur emploi, tandis que d’autres, même financièrement stables, le font par manque de confiance dans les crèches privées.C’est le cas de Marième Sall, ancienne directrice commerciale dans une grande entreprise. Après plusieurs expériences traumatisantes, elle a choisi de quitter son poste pour s’occuper de son enfant. « Ce n’est pas une question d’argent. Mon mari et moi pouvions payer une crèche de qualité. Mais après des négligences répétées, j’ai compris qu’aucun tarif ne garantissait le bien-être de mon bébé », confie-t-elle.
Elle raconte une expérience marquante : « Mon fils n’avait que trois mois. Je payais 100 000 FCFA par mois, mais il revenait avec des couches non changées, des rougeurs et dans un environnement mal entretenu. Un jour, je l’ai retrouvé seul, en pleurs, pendant que les puéricultrices étaient sur leurs téléphones. J’ai décidé de le retirer immédiatement. »
Pour Marième, mère après huit ans de mariage, confier son « trésor » à des inconnus n’est plus envisageable. « Aucun salaire, aucun poste ne vaut plus que lui. Je n’ai plus confiance, ni dans les crèches, ni dans les nounous, ni même dans les proches. Ce qu’ils font en ta présence et en ton absence, c’est différent. L’État doit agir pour résoudre cette équation qui brise les rêves de tant de femmes », plaide-t-elle, appelant les députés à aborder cette question à l’Assemblée nationale.
Des rêves brisés par le coût des crèches
Contrairement à Marième, Daba Diop, ancienne étudiante en gestion à l’UCAD (FASEG), a vu son avenir basculer à cause des frais exorbitants des crèches. Mère célibataire sans soutien, elle rêvait d’une carrière dans la banque, mais la réalité l’a rattrapée. « Les crèches demandaient entre 75 000 et 80 000 FCFA par mois. À cinq mois, mon bébé ne pouvait pas rester au campus social, et je n’avais pas les moyens de payer », explique-t-elle, la voix empreinte de résignation.Faute d’alternative, Daba a abandonné ses études et est retournée dans son village pour élever son enfant. Aujourd’hui, elle se débrouille dans la vente en ligne, loin de ses ambitions initiales. Elle critique également la récente décision de l’UCAD d’interdire les bébés dans les amphithéâtres : « C’est une mesure discriminatoire et injuste, surtout pour les étudiantes mariées ou mères célibataires. Les autorités universitaires doivent revenir sur cette décision pour permettre aux femmes de poursuivre leurs études. »
Entre sacrifice et résilience : le combat de Bineta Kane
Bineta Kane, employée dans un cabinet de consulting juridique, incarne la résilience de nombreuses mères sénégalaises. Bien que préoccupée par la qualité des crèches, elle continue d’y confier sa fille, faute d’alternative. « Je paie 95 000 FCFA par mois, un tarif exorbitant. Il y a trop d’enfants pour trop peu de personnel, mais fermer les yeux est souvent la seule option. Rester à la maison n’est pas envisageable pour moi », confie-t-elle.Bineta souligne une conséquence alarmante : « Cette situation pousse de nombreuses femmes à recourir à la contraception juste après le mariage, par peur des obstacles que la maternité impose à leur carrière. » Pour elle, renoncer à une carrière après des années d’études est une « violence silencieuse ». Elle appelle à une mobilisation collective : « Les organisations féminines doivent porter ce combat. L’État, les entreprises et les collectivités locales doivent créer des crèches accessibles et bien encadrées pour soulager les femmes. »
Un frein à l’autonomisation des femmes
Ces témoignages mettent en lumière une réalité cruelle : au Sénégal, la maternité devient un obstacle majeur à l’émancipation professionnelle des femmes. Le manque de crèches fiables, accessibles et de qualité contraint certaines à abandonner leur carrière, leurs études ou même à quitter Dakar. Ce phénomène constitue un frein silencieux à l’autonomisation des femmes et à l’égalité des chances, soulevant une question cruciale : pourquoi donner la vie devrait-il compromettre les ambitions professionnelles ?
Le cri d’alarme des organisations féminines
Face à cette crise, le Réseau National des Femmes Travailleuses du Sénégal (RENAFETS) tire la sonnette d’alarme. Fatou Binetou Yaffa, présidente de l’organisation, dénonce une situation inacceptable : « Les crèches privées pratiquent des tarifs exorbitants, entre 75 000 et 100 000 FCFA par mois, inabordables pour beaucoup. Il est temps que cette problématique soit reconnue comme un obstacle majeur à l’insertion des femmes dans le marché du travail. Aucune femme ne devrait renoncer à ses rêves à cause du coût ou de l’absence de crèches fiables. »Le RENAFETS propose des solutions concrètes : investir dans des crèches publiques de qualité, renforcer la régulation des crèches privées, subventionner les frais pour les familles vulnérables et rendre obligatoire l’installation de crèches dans les grandes entreprises. Par ailleurs, l’organisation a lancé le projet Counting Women’s Work (CWW), financé par la Fondation Hewlett et mis en œuvre avec le Population Reference Bureau (PRB). Ce programme vise à quantifier le poids des tâches de soins familiaux non rémunérées, comme la garde d’enfants, qui freinent l’autonomisation des femmes.En attendant une réponse des autorités, le RENAFETS appelle à une mobilisation nationale pour garantir aux femmes le droit de travailler et de s’épanouir sans sacrifier leur rôle de mère
Commentaires (36)
Lorsque nous etions petits nous etions pres de 20 personnes chez ma grand mere entre ses enfants, nieces, petits enfants etc. Mes oncles allaient au travail mais il y avait tout le temps quelqu'un pour surveiller les enfants. Ensuite les choses ont evoule et les gens prenaient des bonnes pour enfants a 15 mille par mois juste pour les enfants. Desormais c'est fini car avoir une bonne a moins de 30 mille est presque impossible.
Si tu dois payer 100 mille pour une creche pourquoi ne pas prendre une jeune bonne a 50 mille?
Marième Faye Sall raconte qu'elle a arrêté ses études le jour où Macky lui a amené leur fils à l'amphi.
J'ai juste répondu à ta première interpellation par politesse ; mais une femme qui parle de branlette si facilement, sans aucune raison au commentaire auquel elle répond moy loolou.
Je ne reviendrai pas ici pour toi... déjà ton article est très moyen.
Le travail en exterieur a été plus valorisé et c'est cette injustice qu'il faut corriger en completant les ressources des familles d'une facon ou d'une autre.
Tout lieu d'etudes pourrait fournir des enregistrements pour ceux qui s'absenteraient pour des raisons familiales (si le type de cours s'y prete, ce qui est en general le cas pour beaucoup de domaines)
Plutot que de reclamer la valorisation des taches de famille, des "feministes" veulent imiter des hommes qui, dans la "division du travail", ont toujours eté à la chasse. Maintenant que le travail est rémunéré par des employeurs, on a trop mis l'importance sur ce type de gain.
On a occulté le role au foyer qui, par nature tient et enrichit toute la societe, en faisant meme l'epine dorsale.
Bref le vrai combat, c'est de creer un "diplome de Mere de Famille" ! Et de recompenser...
Maintenant, si vous voulez suivre ces "feministes", nous sommes dans un monde de "libertés". Chacune est libre de détruire sa famille de la facon choisie.
Mais, epargnez celle des autres, s'il vous plait.
Bref en resumé, il ne faut pas demander qu'une femme abandonne son role familal pour imiter des hommes, mais que sa part dans la societé soit reconsiderée . C'est ça que doit exiger toute FEMME SERIEUSE; une aspiration legitime et acceptable, loin des FEMMES DESORIENTEES qui vivent dans une logique de guerre entre sexes.
Avec ou sans enfant et que le mari soit au travail ou au chômage, l'essentiel du travail domestique a généralement reposé sur la femme. Dans beaucoup de foyers en ville comme dans les campagnes, ce sont les femmes qui font le ménage, les courses, vont aux champs, vont chercher de l'eau, du bois alors que les hommes sont devant la télé, à la grand place, sous l'arbre à palabre etc. C'est caricatural. Ce n'est pas ainsi partout, mais c'était tranditionnellement le cas. Le tâches manuelles y compris celles physiquement très pénibles ont souvent été délaissée aux femmes. Pourquoi c'est à elles de piler le mil, alors que c'est très physique ? Pourquoi à elles de faire le linge durant des heures et pas les hommes, alors que c'est très physique ? Traditionnellement quand il n'y a pas d'eau, c'est à elles de trimballer avec de lourdes bassines sur la tête alors que c'est très physique et que l'homme y est plus aptes. Le ménage même chose. Je ne cherche pas à être féminsite ou pas, mais du côté du bon sens. Ce que l'on a toujours eu tendance à constater est que le travail ingrat qu'il soit physique ou pas est le plus souvent dévolu aux femmes et quand il faut rester à la maison, pour certains c'est aux femme de systématiquement le faire. C'est injuste.
La meilleure carriere professionnels est l'éducation des enfants si une femme ne peut concilier le boulot et les responsabilités maternelles alors le choix qui s'imposent est de s'occuper des ses enfants.
Bouma kene saga nak.. Dama Wakh sama khalate rek..
Aucun travail n'est ingrat et z'il ne faudrait pas le voir en termes de corvée.
Cette femme qui bouge y tirera des benefices pour sa santé, si elle s'acquitte de bon coeur.
On sait aujourd'hui que la sédentarité tue !
Mais n'oublie pas aussi que c'est nos mamans, elles-memes, en personne, qui nous ont ecartés de ces taches?
A moins que je me trompe?
C'est peut-etre tout simplement qu'on ne nait pas homme, on le devient... (merci Mead. lool )
Ce qui m’étonne c’est la rage des hommes sénégalais à chaque fois qu’on parle de polygamie ou de femmes qui travaillent. Ils sont tout de suite nombreux et virulents dans les commentaires. Y a t-il quelque chose à maintenir, pourquoi avoir peur. Les deux rôles ne sont pas exclusifs et honnêtement j’ai vu des grands mères parce que plus expérimentées apporter beaucoup plus à leurs petits enfants de moins de 3 ans que leurs propres parents. Ne soyez pas sur la défensive, il faut savoir raison gardée.
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