Crèches communautaires : Dakar, carrefour du plaidoyer national pour libérer le potentiel économique des femmes
"Investir dans la garde d’enfants pour libérer le potentiel économique des femmes". C’est autour de ce thème central que s’est ouvert, ce lundi à Dakar, le Forum national de plaidoyer pour la mise en place de crèches communautaires organisé par le Réseau National des Femmes Travailleuses du Sénégal (RENAFETS), avec l’appui de ONU Femmes.
Cette rencontre de haut niveau, qui se poursuit jusqu’au 23 décembre, réunit des représentants de l’État, des collectivités territoriales, des parlementaires, des organisations de la société civile, des ONG ainsi que des partenaires techniques et financiers. L'objectif est de poser les bases d’un modèle national de garde d’enfants accessible, équitable et durable, capable de soutenir l’autonomisation économique des femmes.
La garde d’enfants, un levier économique stratégique
Prenant la parole à l’ouverture du forum, Aïda Gueye Seyni, représentante de la Directrice régionale de ONU Femmes Sénégal, a rappelé que la garde d’enfants dépasse le cadre social pour devenir une véritable infrastructure économique.
"La garde d’enfants est bien plus qu’une politique sociale. C’est un levier stratégique de transformation économique et de justice sociale.
Investir dans la garde, c’est investir dans l’égalité, la prospérité et l’avenir du Sénégal", a-t-elle déclaré.
Selon les études d’ONU Femmes menées dans le cadre du Programme 3R (Reconnaître, Réduire et Redistribuer le travail de soins non rémunéré), les femmes sénégalaises consacrent en moyenne plus de 12 heures par jour aux travaux de soins non rémunérés, dont une part importante est dédiée à la garde des enfants. Cette charge excessive constitue un frein majeur à leur accès à l’emploi décent, à la formation professionnelle et aux opportunités économiques.
Un déficit criant de services de garde accessibles
Le Sénégal compte près de 1,37 million d’enfants d’âge préscolaire, majoritairement concentrés dans les zones urbaines et périurbaines. Pourtant, les services de garde restent rares, coûteux et inégalement répartis. Les crèches privées sont hors de portée pour de nombreuses familles, tandis que les structures communautaires et publiques demeurent insuffisantes.
Bien que le décret 2024-66, encadrant l’ouverture et le fonctionnement des structures d’accueil pour enfants de 0 à 3 ans, constitue une avancée majeure, sa mise en œuvre reste encore limitée sur le terrain.
RENAFETS, un plaidoyer fondé sur des données probantes
Pour Fatoumata Binetou Yaffa, présidente du RENAFETS, ce forum marque une étape décisive dans la mise en œuvre du plan d’action du réseau.
"La mise en place de crèches communautaires est une priorité pour réduire les inégalités de genre et permettre aux femmes, notamment celles du secteur informel, de concilier vie professionnelle et vie familiale", a-t-elle souligné.
À travers le projet Counting Women’s Work (CWW), financé par la Fondation Hewlett et mis en œuvre avec Population Reference Bureau (PRB), le RENAFETS a conduit des recherches approfondies sur le travail de soins familiaux non rémunéré, faisant de la garde d’enfants une question politique et sociale majeure.
L’engagement de l’État sénégalais réaffirmé
Représentant la ministre de la Famille, de l’Action sociale et des Solidarités, Djima Abissane, cheffe de la Division des organisations féminines à la Direction de l'autonomisation économique de la femme a salué l’initiative du RENAFETS et rappelé l’alignement de ce plaidoyer avec les orientations nationales.
"Investir dans la garde d’enfants, c’est investir dans l’autonomisation économique des femmes, la productivité et le développement harmonieux de la petite enfance", a-t-elle affirmé.
Elle a également souligné la cohérence de cette démarche avec la future Loi d’orientation sur l’autonomisation économique des femmes, voulue par le Président de la République Bassirou Diomaye Faye et mise en œuvre par le Premier ministre Ousmane Sonko.
Vers un passage à l’échelle des crèches communautaires
Dans le cadre du Programme 3R, ONU Femmes a déjà contribué à la réhabilitation et à l’équipement de 40 à 60 structures communautaires de garde d’enfants dans les régions de Saint-Louis et Ziguinchor, démontrant l’impact positif de ces services sur la disponibilité économique des femmes et le bien-être des enfants.
Le forum vise désormais à capitaliser ces expériences, renforcer la concertation inter institutionnelle et formuler des recommandations opérationnelles pour un passage à l’échelle nationale, incluant les aspects réglementaires, institutionnels et financiers.
À l’issue de ces deux jours de travaux, les participants espèrent aboutir à un consensus fort autour de la garde d’enfants comme pilier de l’économie de soins et moteur d’égalité de genre.
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